Voici une rapide présentation du Barrage de Serre-Ponçon : petit rappel sur son histoire, sa construction, présentation des caractéristiques techniques et enjeux actuels et futurs pour le territoire.
Le barrage a donné naissance au lac de Serre-Ponçon, une retenue articielle situé dans les Hautes-Alpes, à la limite des départements des Hautes-Alpes et Alpes-de-Haute-Provence (50% sur la commune de Rousset, 50% sur la commune Ubaye-Serre-Ponçon / La Bréole). Le Lac est alimenté par la fonte des neiges et des glaciers d'altitude, alimentant par affluent la Durance et l'Ubae, qui elle-même se jettent dans la retenue respectivement au niveau d'Embrun et au niveau du Lauzet-Ubaye.
Années après années, le barrage de Serre-Ponçon est devenu, outre le réservoir hydraulique de la Provence, également le poumon économique des Alpes du Sud.
Vous trouverez ci-dessous une rapide présentation de cet équipement industriel EDF, et l'explication de son importance pour le territoire et la région PACA.
L'idée de la construction d'un barrage nait à la fin du 19ième siècle, notamment suite aux crues de 1843/1856 et la pénurie d'eau de 1895. Avant entre les deux guerres, la voie ferrée entre Chorges et Barcelonnette était en bonne voie et son tracé contrecarrait tout projet.
Il a fallu attendre l'après seconde guerre mondiale, où le pays avait besoin d'énergie pour reconstruire le pays et le faire entrer dans la modernité, pour que le projet ressorte des cartons comme état d'importance stratégique :
- 1856 premier projet de barrage sur la Durance
- 1896 Ivan Wilhelm, 3 ans après sa nomination aux Ponts et Chaussées, cible Serre-Ponçon comme un site potentiel
- 1909 Ivan Wilhelm publie une étude complète sur l'équipement de la Durance
- 1948 EDF est mandatée par l'Etat pour envisager la construction du barrage
- 1951 décès d'Ivan Wilhelm, le concepteur du barrage. Il avait suggéré qu'on le construise sous la forme d'une digue en terre, inspiré de techniques américaines
- 1955 le projet de construction du barrage déclaré d'utilité publique. EDF valide un barrage en terre (et non pas sous la forme d'une voute en béton)
- Avril 1957 à novembre 1959 construction
- par prélèvement de matériaux sur place (sable alluvions, argiles, enrochements), 3000 personnes ont travaillé sur le chantier de 2h du matin à 22h
- 2 villages ont du être détruit (Ubaye et Savines), seul Savines est reconstruit plus en hauteur, 1500 personnes ont été déplacées
- Déplacement et reconstruction des réseaux routiers et ferroviaires
- 1958 : sortie du film l'Eau Vive portant sur l'évacuation des habitants et la mise en eau de la retenue (réalisateur François Villiers, sur un scénario de Jean Giono, chanson du même nom interprétée par Guy Béart)
- 1959 à 1962 Achile de Panaskhet construit le nouveau Savines
- 1959 / septembre achèvement de sa constrution, le barrage est concédé à EDF pour 75 ans
- 1959 / 16 novembre : début mise en eau
- 1960 à 1961 Mise en service des groupes de l'usine hydroelectrique
- 1960 / 15 mai inauguration du Pont de Savines
- 1961 / 18 mai : fin mise en eau, achevement du projet de la retenue de Serre-Ponçon.
- Il n'y aura pas d'inauguration en raison de la Guerre d'Algérie, le Président de Gaulle n'ayant pu venir.
- A l'époque c'est le plus grand barrage d'Europe en capacité. Ce record a depuis été dépassé.
- 1977-1979 : étude construction d'un second barrage "La Chute des Baumes et d'Embrun", en amont de la cité archiépiscolale
- Objectif : désengraver la queue de retenue du lac de Serre-Ponçon entre Crots et Embrun
- Caractéristique : barrage digue en terre d'une hauteur de 41,50 mètres situé à hauteur de Saint-André, avec une queue de retenue à la limite de la commune de Saint-Clément-sur-Durance, 2 usines de productions, pas d'exploitation touristique
- Mise en eau prévue : 1983 > finalement le projet a été abandonné, en raison de l'installabilité des terrains et des berges de la Durance
Comme nous l'avons vu, des villages ont du être engloutis, avec de graves souffrances à la clef, et des dépaysements forcés. Certains ont même quitté la région. Suffisemment pour exorciser ce traumatisme via des légendes urbaines.
Vous trouverez, en visitant le Muséoscope du Lac un rappel de cette petite histoire / mythe local, une photo à l'appui, de quoi alimenter votre imaginaire...
Depuis 1980, des signalements réguliers seraient effectués à la police, concernant l'apparition d'Amédée fréquentes sur les berges du Lac. Avec même des vidéos à la clef. Amédée serait un habitant de la vallée avant les travaux qui avaient décidé de la quitter en raison de la construction du barrage. Pendant les travaux, des accidents inexplicables lui sont attribués...
N'ayez crainte, mais profitez-en pour aller visiter ce musée du Lac, qui retrace la construction de ce barrage en terre innovant, et son impact sur les populations.
- 1 barrage en terre
- Hauteur au dessus du lit : 123 m
- Largeur du barrage en crête : 600 m
- Épaisseur du barrage à la base : 650 m
- Volume du barrage : 14 millions de m³ de terrassements (soit 6 fois le volume de la grande pyramide de Chéops), dont 2 millions pour le noyau étanche
- Volume de la retenue : 1, 272 milliard de m³ d'eau (soit l’équivalent de 600 000 piscines olympiques)
- Surface du lac 2800 hectares
- Côte maximale 780 NGF (côte optimale d'exploitation touristique)
- La plus importante retenue artificielle de France métropolitaine
- Le plus grand barrage d’Europe en terre compactée
- Le deuxième plus grand lac artificiel d’Europe par sa capacité, troisième par sa superficie
- Construit pour résister à un séisme de magnitude 7 sur l'échelle de Richter et à une crue maximum de 3440m2/s (le double de celle de 1957)
- 1 Centrale Electrique est imaginée par les architectes Jean de Maily & Jean Prouvé
- Production annuelle moyenne : 720 GWh soit la consommation de 300 000 habitants environ
- Puissance : 380 MW (4 turbines hydroliques Francis de 95 MW à réaction) soit 1/3 d'un réacteur nucléaire
- Débit équipé : 300 m3/seconde
- Pilotage de la production depuis le centre de conduite régional de Sainte-Tulle (près de Manosque), qui synchronise les 19 ouvrages répartis sur la Durance et le Verdon (2000 MW mobilisables dont Serre-Ponçon)
- 1 bassin de compensation de 6 millions de mètres cube (Lac d'Espinasses), qui alimente le canal EDF de la Durance
- Le Canal EDF de la Durance
- Co-gestionnaires : SMADESEP & EDF
Comme présenté ci-avant, la retenue de Serre-Ponçon se distingue sur 2 aspects :
- Une gestion multi-usage de l’eau : production d’énergie, gestion des crues et activités nautiques / touristiques
- L'alimentation en eau de toute la région : un véritalbe château d'eau de la Provence, des ressources sont dédiées à l'agriculture et alimentation en eau potable de Paca et des différentes canaux.
Par ailleurs, Serre-Ponçon et les centrales du Verdon sont regroupées sous l'appelation Chaîne Hydroelectrique Durance-Verdon :
- La retenue de Serre-Ponçon alimente le canal EDF de la Durance, qui transporte l'eau stockée sur plus de 250km jusqu'à l'étang de Berre (Saint-Chamas) :
- 15 centrales turbinent l'eau sur ce parcours en aval du barrage, et 8 centrale en amont (sur la Durance et ses affluents)
- La chaîne Durance-Verdon, totalisent 32 centrales, une production de 7 milliards de kWh / 10% de la production hydrolique française, 40 à 60% de la production électrique Pava, 15 à 20% de sa consommation, une production de puissance de 2000MW soit 2 réacteurs nucléaires.
EDF ayant des obligations contractuelles avec l'Etat par concession en matière de production d'électricité, mais aussi de fourniture de l'eau pour l'aval (agriculture et eau domestrique Paca), les Hauts-Alpins souhaiteraient reprendre en main la gestion du barrage afin de gérer le risque de manque d'eau et l'impact sur l'activité touristique. En effet, depuis 2008, une simple convention entre EDF et le SMADESP (Syndicat Mixte de Gestion et de Développement de Serre-Ponçon) garantit le remplissage optimal du lac pour juillet et août, car dans la concession EDF n'y est pas tenue.
Dans le contexte de rechauffement climatique, et du positionnement du lac de Serre-Ponçon comme une véritable destination nautique, la gestion de l'eau de la retenue devient assez régulièrement un enjeu à partir de la mi-août. Il arrive que la côte soit très basse dès le mois d'Août, génant l'exploitation touristique.
L'Europe incite les Etats à libéraliser ce secteur par appel d'offre à l'issue des concessions, la France est même sous le coup d'une procédure d’infraction pour “rupture de l’égalité de traitement entre différents opérateurs économiques” :
- EDF est en situation monopolistique en France avec 80% du marché de la production hydroélectrique (400 ouvrages)
- La concession EDF se termine thoériquementn en 2051 mais l'Etat pourrait regrouper plusieurs ouvrages de la chaîne Durance Verdon pour les libérer en bloc.
- Le Groupe Suez, Total, Hydro Quebac pourraient postuler ainsi que ...le Département des Hautes Alpes !
Le 12 juillet 2019, la Département des Hautes Alpes a voté une motion pour se porter candidat pour la gestion des barrages hydrauliques du département, via un partenariat public-privé. Les Alpes de Haute Provence n'ont pour l'instant pas suivi. A suivre... !
Le barrage est visible depuis le Belvédère Ivan Wilhelm, qu'il ne faut pas manquer pour entrer en matière. Vous surplombez l'ouvrage, de quoi en percevoir la puissance et importance pour la vallée de la Durance et la Provence.
Pour aller plus loin sur le barrage et son histoire, vous trouverez 3 sites complémentaires :
- Au pied du barrage La Maison de l'Eau et des Energies EDF (ouverte en juillet & août), où vous trouverez maquettes interactives, vidéos construction du barrage, scénographie, salle de projection
- Pendant l'été, plusieurs visites guidées / portes ouvertes du barrage et de la centrale hydrolique sont proposées (tourisme industriel), ne ratez pas les dates (sur inscription préalable uniquement), notamment lors des Journées de l'Industrie Electrique d'EDF.
- Au dessus du barrage à Rousset le Muséoscope du Lac, situé à proximité du Belvédère Ivan Wilhelm (qu'il en faut pas manquer non plus) : nombreux documentaires, témoignaes, maquettes, photos historiques, la présentation complète du projet, etc.
- A Savines au Pôle du XXième le CIAP (Centre Interprétation de l'Architecture et du Patrimoine), pour en savoir plus sur la construction de Savines et son architecture